"ORAZI interroge la nature du monde, le <<corps non organique de l'homme>>, pour trouver des réponses aux grandes peurs de l'humanité. Refusant toute symbolique, le peintre met à l'épreuve la pierre, la plante, l'air, la lumière et s'acharne à vouloir retrouver, par les moyens propres à la peinture, les processus d'évolution de la vivante matière.
Matières originelles, âpres et remuantes, coulées de laves éruptives, météorites pétrifiés, à la fois fragments et moments de la formation de l'univers. Pour affranchir la couleur et son dessin des conventions de l'illusion, l'artiste élabore des formes concrètes par le truchement de toiles apprêtées. Ce relief, qui n'est pas rapporté mais procède d'une modulation sensible de l'étendue, devient en quelque sorte le support dynamique de la couleur. Par lui, elle prend la vie...
Ainsi la forme, qu'elle soit contractée ou toujours en devenir, cherche dans sa tension ou sa poussée tumultueuse à rompre le cadre qui la contraint, à ouvrir des brèches dans cette frontière arbitraire entre l'oeuvre d'art et la vie, qu'elle harcèle, ébranle et déborde à maintes reprises...
ORAZI s'attache à réaliser un paysage élémentaire, à matérialiser les sourdes pulsations qui en exaltent la structure et en diversifient la respiration.Arrachée à la préhistoire de l'humanité, cette réalité palpitante, primordiale, nous parle aujourd'hui un langage prophétique et nous engage à reconquérir l'immense champ d'action de notre pouvoir créateur."

Raoul-Jean Moulin

Citation de: Les Lettres Françaises, <<Les Arts>>, 10-16 Mars 1966.

Ce texte figurait aussi sur le carton d'invitation au vernissage à la Galerie du Passeur <<ORAZI, Peintures en Relief>>, Paris, 1966.